Les gargoubruits

21h, je sors sous les étoiles.

Un coup de voiture et me voilà à la pension.

Après les phares, mes yeux s’habituent a l’obscurité.

La demi-lune éclaire à demi-ton, j’arrive à l’entrée du pré.

Je plisse les yeux : trois silhouettes claires sont là.

« Laquelle est la mienne ? » Je ris à moi même. « La mienne ? Haha, la sienne, oui ! Laquelle est la sienne ? »

Il est là, a l’écart.

Comment je sais que c’est lui ?

J’entends d’ici ses petits « huhus »

Ah, petit cheval, si tu savais comme ces huhus me font chaud au coeur 🫠🥰

Je m’approche, propose mes mains pour une gratouille d’accueil.

Il se sert une vigoureuse gratte dans l’oreille gauche, puis du front, et d’une plus légère de l’oeil.

Je passe ma main sur son encolure,

il prolonge la caresse en se positionnant pour orienter mes mains sur son arrière main.

Je connais bien ses endroits préférés,

nous nous installons complices dans cette posture, où j’appuie ma joue contre son flanc.

J’entends le bruit de gargouillis, de chaque côté.

Je sens sa respiration, lente et puissante.

Je sens la tension dans l’expiration forcée.

La douleur semble encore présente.

Quelques heures plus tôt, je bénissais sais ma prévoyance, d’être allée me former aux premiers secours équins.

De reconnaître les signes d’une colique, et de savoir quoi faire.

Je bénissais ma vétérinaire, d’avoir accepté de prescrire la calmagine pour que je puisse faire sans attendre l’injection qui le soulagerait.

Je bénissais mon travail en indépendante, qui me laissait plusieurs heures pour suivre l’évolution.

Ce soir, assise aux pieds de ce cheval,
avec les étoiles comme témoins et le petit chien comme bouillotte,
je profitais de nos présences.

Mon esprit vagabondait, du pire qui pouvait arriver,
à tout ce que nous avions déjà vécu,
à nos finitudes respectives.

Toutes ces choses qui font la Vie.

La grande Ourse, Orion, la Lune.
Une pensée pour Ayla, la Zelandoni.
Une pensée pour Rumì.